RETROSPECTIVE
VESPA
Le Mondial du deux roues à permis de découvrir, à travers une
exposition consacrée aux Vespa, quelques uns des modèles qui ont forgé la légende de
Piaggio, et par conséquent, celle du scooter.
Une douzaine de Vespa étaient exposés, venant du Musée Piaggio de Pontedera, comme le
premier prototype MP5, la Vespa Montlhéry à fuselage profilé, ou encore la Vespa MP6
Stemma Aéronautica, ainsi qu'une quarantaine de Vespa réunis par le Vespa Club de
France.
Le
"Musée Piaggio Giovanni Alberto Agnelli "de Pontedera au Mondial du deux-roues.
Inauguré le 29 mars 2000,le musée a vu le jour dans
l'établissement Piaggio de Pontedera (Pise), dans les ateliers où quelques années plus
tôt hommes et machines faisaient encore battre le cur de l'usine. Les salles
d'exposition, sur 3 000 m2 environ, ont été réaménagées avec goût par l'architecte
italien Andrea Bruno. Abritant une centaine de véhicules et le riche fonds des Archives
historiques,le musée est entièrement voué à l'histoire de la société. Les Archives
ont recensé plus de 150 000 documents, au nombre desquels des films, photographies,
dessins, maquettes des campagnes publicitaires des années 1950 à nos jours et épreuves
des calendriers où la Vespa est mise en vedette par de célèbres acteurs ou actrices.
L'entreprise Piaggio a été fondée à Gênes en 1884 par Rinaldo
Piaggio. Elle connaît un rapide essor, entraînant l'ouverture de plusieurs autres
établissements, en Toscane notamment,à Pise en 1917 et à Pontedera en 1924. De 1884 à
nos jours,l'histoire de Piaggio se confond avec celle des moyens de transport maritimes,
terrestres et aériens puisque outre l'armement de navires, activité première de
l'entreprise Piaggio,la société s'est lancée dans la construction ferroviaire, la
fabrication de vedettes lance-torpilles, d'avions, d'autobus, de camions, de moteurs
aéronautiques, d'hélicoptères (au stade expérimental uniquement)mais également et
surtout, de 1946 à aujourd'hui,de scooters. Dans les années 1920 et 1930,
l'établissement de Pontedera comptait plus de dix mille personnes, ouvriers,
dessinateurs, techniciens, ingénieurs et personnel administratif, et produisait des
moteurs aéronautiques, des hélices d'avions et des wagons ferroviaires. 1946 a marqué
un tournant dans l'histoire de l'usine lorsque,après avoir conçu quelques prototypes
(MP5 ou Paperino et MP6 tous deux exposés à Paris),Enrico Piaggio a décidé de
produire la Vespa, puis de commercialiser en 1949 l'Ape.
L'histoire de Piaggio -comme l'histoire de toute grande entreprise
prospère -est une histoire d'hommes, de recherche technique et scientifique, de design.
Elle est également l'histoire de la société en général. Les ateliers ont vu se
succéder des générations d'hommes et de femmes engagés par leur travail à produire
des objets,des moyens qui ont étayé l'évolution du secteur des transports et écrit en
même temps l'histoire d'une société faite de conflits syndicaux, de périodes de
croissance économique et de crise, de modernisation des produits.Cette évolution a été
synonyme de travail et, par voie de fait,de richesse pour une terre à forte vocation
agricole jusqu'au début du XXe siècle. Cette histoire, avec ses cycles et avec ses
produits, est magnifiquement racontée par le Musée et les Archives.
L'idée du musée a été, dès le départ,au cur d'un projet
élaboré au début des années 1990 à Pontedera par le président de Piaggio,Giovanni
Alberto Agnelli. Homme de culture et de lettres mais également dirigeant engagé,
Giovanni Alberto souhaite confier à quelques étudiants de la faculté d'économie de
Pise la réalisation de thèses sur l'histoire de l'entreprise. Une demande précise car
le jeune président sait combien il est important de connaître son passé. Connaître
l'histoire de la société dans laquelle on travaille permet d'accroître le sentiment
d'appartenance à cette entreprise aussi bien de la part des ouvriers et des dirigeants
que des communautés locales qui vivent au-delà des murs de l'entreprise. Cette demande
de thèses a également permis au président de Piaggio de créer un lieu de rencontre
entre l'entreprise et l'université aussi bien dans le domaine de la recherche technique
et scientifique qu'au niveau des jeunes étudiants. Cette démarche a également été
portée par une autre motivation : pouvoir se vanter, parmi quelques rares sociétés au
monde, d'exister depuis un siècle, est un atout supplémentaire pour asseoir sa
crédibilité sur le marché et apporte par conséquent une forte valorisation en termes
de marketing et de communication.
Outre les motivations culturelles et promotionnelles de l'image de
la société, il y a dans ce projet l'intime conviction de la valeur immatérielle de la
culture, c'est-à-dire la valeur ajoutée que la culture peut apporter à une entreprise
qui produit des véhicules à moteur.
Ces motivations profondes ont permis la rencontre d'un homme d'entreprise et d'un doyen
d'université d'histoire économique. À partir de là,au fil des entretiens, un projet
ambitieux a pris forme : constituer un fonds documentaire historique et donner la
possibilité aux produits d'apporter leur témoignage au sein d'un musée. Si le cur
des archives a rapidement été constitué, il a fallu des années pour réaménager le
site industriel et compléter le musée. Le projet culturel a donné naissance à un
troisième élément en corrélation avec le fonds documentaire et le musée : la
Fondation Piaggio. Cette fondation a été pensée comme un organisme représentant d'un
côté un point de rencontre entre entreprise et culture et de l'autre, un point de
convergence pour l'entreprise et des collectivités territoriales vers la promotion
d'initiatives scientifiques,de débats et d'événements culturels. Ardemment voulue par
le jeune président, par la commune de Pontedera et par la province de Pise,la Fondation
Piaggio a vu le jour en 1994. Créée sous forme de société, elle est détenue à 50%par
Piaggio et à 25% respectivement par les deux organismes publics. Un bel exemple de
collaboration totalement paritaire entre secteur public et secteur privé.
Depuis sept ans maintenant, la Fondation a permis de mettre en
uvre toutes les opérations nécessaires à la réalisation du musée Piaggio. Elle
est aussi un précieux outil de promotion pour les initiatives artistiques, culturelles et
scientifiques, particulièrement importantes pour les collectivités territoriales de la
Toscane, mais également de l'Italie et de l'Europe. Parmi les événements
organisés,certains sont continus comme la publication d'une précieuse collection de
cahiers de la Fondation, titre qui aborde et débat de thèmes d'actualité sur
l'économie, le travail, l'archéologie industrielle ou encore l'Europe. Les salles
d'exposition du musée accueillent en permanence des Vespa et des uvres d'art,
servent de cadre à des représentations théâtrales,aux débats de spécialistes en
médecine, économie, société, banque et finances, culture générale. Un espace
d'utilité publique a ainsi été créé,permettant à l'entreprise et à la société de
se rencontrer quotidiennement et de s'opposer sur des thèmes souvent éloignés des
activités principales d'une entreprise de moyens de transport. Un espace à même de
créer une synergie à l'origine d'un enrichissement réciproque et une grande
compatibilité entre entreprise et culture, entre collectivité territoriale et
entreprise, conformément à l'âme du projet initial.
Giovanni Alberto Agnelli a disparu en 1997. La nouvelle
direction de Piaggio, sous la conduite du président Alessandro Barberis et de
l'administrateur délégué Stefano Rosselli Del Turco, a cru en ce projet, en a accepté
l'héritage et mené à son terme la réalisation du musée dont elle a assumé la
gestion, acceptant de lourdes dépenses et libérant la Fondation d'un poids financier
important. Aujourd'hui la société a radicalement changé son organisation
sociale,passant des mains de la famille Piaggio et Agnelli sous le contrôle de Morgen
Greenfield. Mais l'histoire de la Fondation se poursuit,sous l'impulsion de ses principaux
instigateurs.
Le musée est visité chaque jour aussi bien par les inconditionnels
du deux-roues italien que par des spécialistes en histoire industrielle et en
communication,ou par des étudiants en économie, ingénierie ou sociologie. Abritant la
plus importante collection de Vespa et de Gilera au monde, il devient un splendide livre
ouvert dont chaque page raconte la fascinante histoire du scooter qui a révolutionné le
secteur des transports, qui a été et reste un objet de désir même pour les femmes,
dans un univers de mécanique qui, avant son avènement, était essentiellement masculin.
La Vespa reste l'image symbolique de la reprise économique et du miracle italien,dans une
Europe détruite au sortir de la Deuxième Guerre mondiale. Symboles de la reconstruction
et de la reprise, les modèles exposés racontent une histoire de liberté, de rêve et de
travail.
Aujourd'hui, le livre de cette histoire est présenté pour quelques
semaines à Paris, dans un cadre splendide et majestueux. Ce n'est pas un hasard si, à
l'aube du nouveau millénaire, le premier modèle de Vespa revient à Paris, dans une mise
en scène qui rappelle la présentation préparée par Corrandino d'Ascanio en 1948 pour
les Champs-Élysées lorsque, pour la première fois, les rues de Paris ont accueilli le
petit scooter. Ce n'est pas un hasard si le symbole de la liberté,de la jouissance du
temps libre,du travail et du rêve revient cinquante ans plus tard à Paris,véritable
capitale du monde, pour rappeler l'univers des constructeurs et des passionnés des
deux-roues et, avec eux, de toute la société, aux valeurs d'alors et de toujours,avec un
changement radical : une période de paix ayant entraîné bien-être et richesse
maintenue en Europe lors des cinquante dernières années.
Tommeso Fanfani,
Président de la Fondation Piaggio.
(source : Communiqué de presse, Organisation du Mondial du deux roues, 2001).
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